samedi 30 mars 2013

La route de TULEAR



Vendredi 29 mars

Une fois le massif de l’Isalo doublé par le « Sud », la RN 7, plutôt en bon état,  file vers Tuléar presque en droite ligne à travers une nature nettement moins riche que précédemment

Quelques cultures, mais aussi de la savane en terrain de douces collines, quelques forêts dont celle d’un Parc National réputé pour y observer les oiseaux à condition de se lever tôt, et puis au fur et à mesure que l’on se rapproche de l’océan, une végétation côtière où nous retrouvons les baobabs et les cocotiers entre autres… Ainsi nous sommes passés du pays Bara au Pays Mahafaly et Véso sur le littoral puisque pêcheurs.

Les habitations de terre sont encore plus modestes, parfois de simples constructions de branchages à la manière de tente « canadienne »… 3 gamelles autour, des gosses morveux au sourire néanmoins éclatant, des poulets et guère autre chose.

A 25 kilomètres de Rahonira, la bourgade d’Ilakaka du nom de la rivière éponyme qui lui donna sa réputation internationale. Ilakaka c’est le « far West » où tout le monde s’est rué en 1998, à partir du jour où un Français est « tombé » par hasard sur un…Saphir !

Aussitôt le hameau de trois baraques est passé en quelques mois à un village de planches et de tôles de plusieurs milliers d’âme, la campagne s’est truffée de trous de 10 à 20 mètres pour fouiller la nappe phréatique, et les acheteurs sont arrivés du monde entier : de Thaïlande, du Sri Lanka, de Palestine, des US, d’      Afrique du Sud etc…

Le béton est arrivé : tailleries et comptoirs de vente qui drainent les pierres de toute l’île (à Madagascar il ne manque que le diamant), mais aussi les bars, hôtels, les églises, temples et une mosquée… Attention Ilakaka compte plus de pauvres que de chanceux, et les détrousseurs de routes qui sévissent dans les environs ne viendraient pas d’ailleurs !

De part et d’autre de la route transformée en boyau « commercial », s’étant une marée de cabanes de terre et de bois, nous appellerions ça un « bidonville » chez nous là-bas chez les nantis qui se plaignent toujours, ici chez ceux qui ne se plaignent pas, c’est une ville où l’on peut gagner l’équivalent de 2 euros par jour pour 6 heures de pelletage, l’encas de 10 heures et le déjeuner assuré.

L’arrivée à Tuléar s’annonce par sa colline aplatie qui au milieu d’une bande bleue « cobalt » surgit de l’horizon, et nous découvrons cette ville, la plus importante de « Sud », alors qu’elle est écrasée sous le soleil de midi. Chaude toute l’année, il faisait 35° vers 13 heures lorsque nous sommes arrivés.

Nous nous attendions à voir une cité plutôt jolie, avec de vieux restes de la colonie et une promenade bordant une belle plage, et nous n’avons trouvé qu’une ville plate, poussiéreuse et d’autant moins de charme qu’elle s’écrase sur un littoral envahi par une mangrove laissant tout juste accès à l’océan par une plage de sable gris livrée à l’activité de pêche et que nous découvrirons à marée basse. Un môle s’avance néanmoins à la rencontre des flots pour accueillir les boutres qui font la côte.

Nous déjeunerons « au boeuf », véritable repaire des vieilles badernes Vasas qui trimballent leurs jeunes épouses malgaches, souvent affublées de jolis bambins… Merci le « viagra » !

Le Patron Guillaume est jeune par contre, un métro mi-Niçois et mi-Alsacien, perdu pour le vieux continent… Anne s’est régalée de son poisson en sauce et je ne saurai que vous recommander ses rognons de zébu, sauce au vin… Le bonheur à 4 euros (non compris la bière et le café) soit une heure de repas pour certains ou 12 heures de pelletées pour d’autres  !

Si nous avions hésité à passer une nuit à Tuléar avant d’attaquer la piste pour Ifaty notre « religion » était faite et Maurice était bien d’accord avec nous pour reprendre le volant et ne pas s’éterniser plus que nécessaire… Et nous avons attaqué le sable !




 





vendredi 29 mars 2013

LE MASSIF DE L’ISALO




Mardi 26 / mercredi 27 et jeudi 28 mars

En dehors de quelques affaissements, rares, la route du « Sud » (probablement moins fréquentée que plus au « Nord »), est bonne en terre Bara, le peuple du« Sud » intérieur qui fait suite aux Betsiléo.

Les Bara ont la triste réputation historique d’être des voleurs de zébus, d’ailleurs c’est en leur terre, sur les pistes de l’intérieur que les voleurs de troupeaux sévissent, kalachnikov en main. Doutons que ce soit les Bara qui se volent aussi violemment entre eux.

Pas de vrais risques sur la grande nationale et chemin faisant, nous avons croisé quelques « cow-boys» Bara, qui pieds nus et sans cheval, acheminaient tranquillement leur bêtes en direction du grand marché aux zébus des mercredi et jeudi matin d’Ambalavao… Ils n’avaient plus qu’un bon cent kilomètres à parcourir !

Au fur et à mesure de notre avancée à travers un massif de plus en plus montagneux, du grés cette fois-ci m’a-t’il semblé, la végétation s’est mise à évoluer, principalement après Ihosy. Une séduisante petite ville où nous avons pris un café chez une dame avec un très beau visage, pour devenir plate (la végétation pas la dame) tout juste buissonnante (toujours la végétation) à la manière de la savane, puis rase comme les grandes étendues d’Amérique du nord ou d’Amérique du Sud… Et nos presque 250 kilomètres effectués, nous avons vu poindre à l’horizon une large et dentelée strie bleue, le Massif de l’Isalo et au pied, le bourg de Ranohira, ville au nom prédestiné puisque voulant dire « l’eau des lémuriens ».

Nous avons posé nos sacs pour trois nuits.

Une fois l’hôtel réservé et une fois le Guide rencontré pour organiser nos deux jours de découvertes du Parc de l’Isalo, nous avons repris la route à travers un véritable décor pour western, afin de« chopper » à une dizaine de kilomètres, le coucher du soleil au lieu dit « la fenêtre de l’Isalo », point d’orgue d’une journée bien chargée.

La fenêtre de l’Isalo est une ouverture rocheuse naturelle qui s’ouvre sur une plaine de palmiers et de roches aux formes étranges… L’endroit est si perdu, quasi désert lorsque nous y étions en dehors d’un couple venu juste au dernier moment avec leur chauffeur, que Maurice, pas tranquille, a voulu que nous déguerpissions sitôt le soleil disparu.

L’an dernier, des touristes la pétoire sur le ventre s’y sont faits dépouiller… Bonjour l’ambiance !











Une fois n’est pas coutume, je cite le guide Gallimard : «  Le Parc de l’Isalo recoupe les limites du Massif du même nom, de formation de grés jurassique que l’érosion a entaillé de profonds canyons et hérissé de pics aux formes insolites. Dans ce cadre grandiose alternent plaines herbeuses et déserts de pierres aux formes tourmentées, dont les couleurs virent du gris métallisé à l’ocre rouge au fil des heures de la journée. Véritable jardin botanique dans un décor de western, le Parc abrite une flore et une faune particulièrement adaptées aux escarpements rocheux ».

Voilà ce que nous avons arpenté de 8 heures ce matin (départ 7 heures 30 à la fraîche) à 15 heures pauses comprises, pour souffler, pour admirer, pour écouter Honoran notre sherpa du jour, pour faire trempette dans la rivière juste avant de « cascroûter » dans les rochers tout en nous amusant avec des lémuriens « makis-cattas »attirés par nos peaux de banane.

Un moment de grâce.

Tout de même 12 kilomètres au compteur avec certes du plat une fois dans le massif mais une succession de montées et de descentes « casse-gueules » même si le chemin est relativement bien balisé avec de nombreuses marches taillées dans le grès.

Sans parler des « enjambades » de la rivière sur des rochers limite glissants.

Car le circuit que nous avons fait se nomme « Circuit de la Namaza », du nom du torrent qui traverse le massif et avec lequel nous n’avons cessé d’avoir rendez-vous, de piscine en piscine, de petites chutes d’eau en cascades.

D’autres circuits existent, des cours pour les groupes qui font un petit tour et puis s’en vont plus loin, et des treks de 2 à 4 jours, tente dans les sacs à dos, pour la jeunesse en quête d’aventure… Avec 30.000 visiteurs par an tout le monde compris, c’est « le spot » de l’intérieur.

Notre sympathique Honoran a plutôt été prolixe en explications, nous dénichant les phasmes et les scorpions en passant par les fourmis, les araignées, chenilles, cocons de soie naturelle etc, nous expliquant les arbres grands et petits comme l’étonnant baobab pachypodium haut de 50 centimètres, les plantes normales ou médicinales avec la chose soignée… Mais rien à prendre sur place pour la fatigue musculaire et le mal aux pieds !

Nous avons croisé des tombes dans des failles basses de la roche, fermées par des pierres empilées et nous avons mieux compris le « retournement des morts » :

Les sépultures rencontrées ne sont que provisoires. Au bout de trois ans si la famille a les moyens de tuer le zébu pour nourrir les convives, où quatre voire plus si l’argent manque, la dépouille est récupérée rituellement, et après ou non un tour de ville, le défunt (ou la défunte) est amené à la rivière et les os débarrassés du reste des chairs et de la peau. Bref, le squelette est briqué à souhait avant d’être paré d’un linceul tout neuf de soie sauvage.  Ainsi prêt pour affronter la nuit des temps, le regretté parent trouve sa place définitive dans une cavité rocheuse inaccessible pour raison de chapardage, toujours murée par l’empilement de pierres. Voilà qui est précisé.

Notre dévoué Maurice après nous avoir menés au pied de l’Isalo ce matin, nous attendait plus au « Nord » à 15 heures et il nous a encore fallu attendre une bonne demi-heure pour satisfaire notre profonde envie d’engloutir une grande bière fraîche avant de filer sous la douche pour revenir à la vie… Ca n’étonnera personne si j’avoue que le reste de la journée s’est déroulée au radar.

Nous avons payé une fortune en « ariany » pour 2 jours d’accès au Parc, toute la population locale en bénéficierait… Pas à regretter pour ça mais pour le reste, qu’est-ce que l’on peut être « cons » parfois car demain nous remettons ça !












En fait le trip de la journée n’a concerné que la matinée, mais de 8 heures à 13 heures nous avons crapahuté avec pour but la découverte du « Canyon des Makis ».

Pour ce faire, il consiste à remonter une partie du cours de la même Namaza, un cran plus en amont puisque c’est de ce dernier défilé qu’elle file vers la plaine avant de se retrouver d’affluent en affluent dans la Mangoky, l’un des principaux fleuve malgache qui déverse ses eaux en un vaste delta dans le canal du Mozambique.

Trois quart d’heure pour parcourir une très mauvaise piste de 17 kilomètres afin d’atteindre (par miracle) une espèce de parking (la saison des pluies dont nous vivons la fin a été particulièrement destructrice cette année et le cyclone qui a balayé le « Sud » de Madagascar début février en a remis une sérieuse couche), puis une bonne demi-heure de marche pour couvrir les 1500 mètres, sans glisser dans les rigoles d’irrigation des rizières, pour atteindre le pied du massif, et enfin une bonne heure d’escalade dans le lit de la rivière pour la remonter le plus haut possible, là où il aurait fallu avoir des cordes pour continuer.

Bien sûr le retour pour clore la plaisanterie, pas question de finir nos aventures au fond d’une gorge étroite de 100 mètres de profondeur au milieu d’un chaos indescriptible de roches de grès qui d’année en année, du fait d’éboulements continuels, n’en finissent pas de s’entasser au fond du lit.

Pas étonnant que peu de gens s’aventurent dans ce truc là !

Un vrai parcours du « combattant » heureusement ponctué de moments de repos au bord de l’eau vive et d’une délicieuse baignade dans un creusé d’eau cristalline douchée par une jolie cascade, au milieu d’un écrin de fougères, de bambous-palmiers et d’arbustes divers, digne du plus nourri des jardins botaniques.

Pas de lémuriens. Sur le retour de la gorge, nous n’avons pas eu le courage de courir après eux dans le petit bois de manguiers où ils vivent, mais sur le parcours « aller » nous avons fait la connaissance d’un super caméléon de 30 centimètres de long, queue comprise, et à l’approche du massif, nous avons été surpris par une superbe envolée de pintades grises et bleues, grosses comme des dindes.

Madagascar est vraiment le Pays de tous les superlatifs !

La veille, en apprenant que la femme d’Honoran tenait un petit restaurant malgache, nous lui avions commandé notre repas du déjeuner et c’est après une bonne douche de remise en forme et nous être changés (nous étions savamment crottés), que nous avons honoré la goûteuse cuisine de la Dame d’Honoran en concluant la belle rencontre par le partage du cigare entre « hommes », des cigares birmans que j’avais achetés l’an passé à des paysans du lac Inlé.

Il existe deux établissements hôteliers de luxe à quelques kilomètres du bourg, « le Roy de l’Isalo » et « la Reine de l’Isalo », deux superbes adresses où les bâtiments de pierres taillées se fondent avec leurs jardins tropicaux dans le décor de roche, nous avons été boire notre café dans le premier, avant de jeter un œil admiratif au second.
Sur la route du retour en ville, une dernière halte à la « Maison de l’Isalo », le petit musée du Parc, nous y avons appris notamment que le massif que nous avons un peu pénétré fait 180 kilomètres de long pour 20 de large avec une altitude qui varie de 515 mètres à 1268 mètres.

Nous étions « à la maison » sur les coups de 15 heures 30 sans avoir la moindre envie de remettre le nez dehors sauf à nous traîner à la salle du « zébu grillé », le restaurant de notre hôtel dit des Orchidées… Moins chic mais très bien aussi.

Demain départ 8 heures pour la côte, Tuléar (Toliara) mais surtout Ifaty à une vingtaine de kilomètres plus au « Nord »… Pour 3 jours de calme et de plage au milieu des pêcheurs Vézo que nous retrouverons après avoir déjà fait leur connaissance à Morondava.