Lundi 8 / mardi 9 avril
Pas de seconde nuit sur les rives du lac Rasoabé,
mais une nuit à Tamatave qui a l’avantage de nous proposer une bonne matinée sur
place plutôt qu’un stop trop bref en passant… Un mal pour un bien, c’est
souvent comme ça la vie. Comment prévoir d’Orsay ?
Chemin faisant, le nez dans le « Lonely
Planet », nous avons arrêté notre choix pour l’hôtel Joffre, sur l’avenue
Joffre, tous les deux au centre de Tamatave… Un vieux reste de la
« colonie », et c’est la raison pour laquelle notre choix s’est porté
sur lui, pour mieux « humer » l’atmosphère du Tamatave d’avant et
d’aujourd’hui.
Cela dit; la visite des lieux sera pour demain
car nous sommes arrivés nuit bien tombée. A quelques petits kilomètres de la
ville, alors qu’il faisait bien jour, nous nous sommes heurtés, c’est une
image, à un énorme semi-remorque
l’arrière dans les arbustes sur le côté droit de la route et l’avant
dans le talus du côté gauche de la route avec les deux roues dans le fossé… E t
tout le monde au spectacle y compris deux flics de la « Force
d’Intervention de la Police » arrivés tous les deux en renfort sur le même
« scout » que l’un des deux avait dû emprunter à son gamin de retour
de l’école !
Evidement, tout le monde y allait de son
conseil, le chauffeur avait simplement voulu entrer dans un village au sol
terreux sans même s’apercevoir que le chemin n’était pas assez large pour sa
cabine, et la nationale de même pour virer à l’équerre… Pas trop de temps de
perdu, j’ai retrouvé José en train de changer une roue, nous ne nous étions pas
rendus compte que nous avions crevé !
Renseignements pris, nous avons fait demi tour
pour opter à nouveau pour la piste, qui nous a amenés aux portes de la ville,
plongée dans l’obscurité pour raison de délestage : vélos, cyclopousses,
tuks-tuks, tous sans lumière, charriots divers bien sûr avec ce qu’il faut
comme pousseurs, des voitures pas toujours éclairées, des piétons partout, mais
les étals des trottoirs éclairés à la bougie pour une vision surréaliste de la
voie à prendre, et, José une main sur le volant et l’autre à essuyer une buée
qui ne partait pas même les glaces ouvertes, vu la drôle de chaleur humide bien
pesante ce soir-là.
De toutes les façons, José nous a expliqué que
la Municipalité de Tamatave est exsangue, le fonctionnement des feux de
signalisation comme à Tana appartient au passé, et il y a belle lurette que les
ampoules de l’éclairage public, là où il existe en théorie, ne sont plus
changées.
Pour ce qui subsiste, de toutes les façons, nous
entrons dans la ville en plein « délestage », une pratique courante à
Madagascar que nous apprécions principalement quand notre ventilo se met au
chômage forcé alors que nous avons à peine fermé l’œil.
« Voir Tamatave et mourir »… Nous
verrons si ça vaut bien le coup demain au grand jour !
Nous nous sommes donc installés au
« Joffre », boulevard Joffre ; l’axe de l’ancienne ville
coloniale de Tamatave qui en réalité porte le nom de Toamasina depuis
l’indépendance mais que tout le monde continue d’appeler ici Tamatave.
Je ne m’en plaindrai pas, c’est ainsi que j’ai appris
à l’école de Papeete dans les années 50, à la positionner sur les cartes
géographiques des « possessions françaises », et qu’à 12 ans je
connaissais par cœur.
Une dizaine de quartiers périphériques sont
venus grossir le « carré français », à l’urbanisme tracé au cordeau.
C’est comme ça à chaque fois, aucun de nos anciens « comptoir » n’a
échappé à l’urbanisme « à la Vauban » pourtant décédé il y a bien
longtemps… Ce n’est pas le compas que nous avons dans l’œil mais une équerre.
Les deux.
Nous ne pouvions que descendre au
« Joffre », vieux bâtiment des années 35 planté au milieu d’un
boulevard qui devait être la promenade des belles esseulées de l’époque alors
que les époux étaient « aux affaires », ici ou ailleurs dans l’île, à
Tananarive ou dans les plantations pas toujours confortables.
Malgré la rénovation des propriétaires actuels,
une remise aux normes qui fait sourire, la bâtisse respire son passé à travers
un charme suranné, à l’image des affiches des années 60 d’Air France qui ornent
une partie des couloirs. Architecture de béton faite d’espaces surdimensionnés,
hauteur des plafonds variable suivant les niveaux mais toujours généreux,
escaliers parés aux plus redoutables des séismes. Une façade aux balcons
impressionnants, bref avec un armement lourd, véritablement, toutes issues
murées, de quoi soutenir un siège.
Mais, chambres à l’esprit « caserne »
exclues, l’atmosphère est au rendez-vous que nous nous souhaitions, et avec les
délestages, la nuit fût, au son intermittent des pluies.
Après avoir flâné longuement en terrasse,
l’Espace en petite réparation de démarreur et nous aussi en quelque sorte. Nous
ne sommes pas à la course, aussi ce n’est que vers 10 heures 30 que nous avons
décollé, les dernières pluies déversées, l’Océan Indien est un grand arroseur.
Tamatave est d’abord le cœur du Pays
Betsimisiraka qui frange avec plus ou moins de profondeur la côte depuis le
Pays des Antaimoro dont nous avons fait la connaissance plus au
« Sud » et les Antakarana de la pointe « Nord » que nous
découvrirons dans quelques jours. Beaucoup d’enfants de mulâtres dans la
troupe, longtemps seule la côte « Est » de Madagascar n’était connue
des Européens, et rien de tel pour pactiser que de « communier »
ensemble !
Si la côte « Ouest » est aussi
peuplée, d’Indo-Pakistanais, à « l’Est » ce sont les Chinois qui se
sont installés début du XXème siècle, tous amenés par les Français de la Région
de Canton, comme dans le Pacifique, en Guyane… Que des gens sérieux pour tenir
le commerce. Eux au moins n’ont pas boudé les locaux et le métissage est venu
conforter les lointaines origines asiatiques de nombre d’ethnies.
A Mananjary, notre « taulière » était
métissée chinoise, notre « taulier » à Manambato aussi, la
« Patronne » du « Joffre » itou…
Le café, la canne à sucre (surtout avant), le
clou de girofle, le poivre, la vanille constituent les ressources principales
du Pays sans oublier de nouvelles plantations de palmiers à huile observées sur
la route, et puis le sous-sol, le Nickel et le Cobalt qui engendrent une
activité importante du Port. Ajoutons le stockage du pétrole brut et la
raffinerie.
Passons sur la pollution minière qui dégagerait
des gaz pas toujours sympathiques, mais le Malgache « de base » n’a
pas l’air d’en faire grand cas.
Autre spécialité du coin, pas moins agréable… Le
palu !
Les vieux bâtiments de la colonie sont en partie
squattés, de toutes les façons rongés par l’humidité et la mousse, le port
fluvial, terminus du canal des Pangalanes, n’est que souvenir, pontons et quais
à l’abandon, rafiots abandonnés à la rouille, en revanche la gendarmerie
française reste coquette en bord de mer, et reconnaissons que de nouveaux
bâtiments administratifs, banques et hôtels témoignent tout de même d’une vie à
la hauteur des 200.000 habitants de la ville.
Si la gare est entrain de renaître de ses
cendres pour mieux être « en train » jusqu’au centre ville, le Port maritime
où ces derniers arrivent directement et partent pour la Capitale au
« déchargé » des cargos, reste très actif, vu de la promenade d’en
face, malgré le temps révolu des cargos mixtes des« Messageries
Maritimes » qui arrivaient de Marseille.
Que l’on sache tout de même que Madagascar vibre
encore et saura un jour rebondir.
Nous avons agréablement déjeuné dans un petit
restaurant à la varangue ouverte sur la plage où les requins viennent aussi de
temps en temps pour manger un peu de chair humaine, et pour équilibrer les
choses, c’est de poisson dont nous nous sommes régalés… Avant d’affronter la
Nationale 5 à la triste réputation.
little Anne was in Paris yesterday. Rain : yes, forest : no. Better stay in Mada !
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